La région de Sainte-Croix entre au Patrimoine culturel immatériel

 

Les savoir-faire en mécanique d’art et mécanique horlogère ont rejoint ce mercredi après-midi la Fête des Vignerons sur la liste représentative tenue par l’Unesco.

La mécanique horlogère et mécanique d’art de l’arc jurassien franco-suisse font désormais partie du Patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. Un inventaire qui illustre la créativité humaine et la diversité de ses expressions culturelles à travers le monde.

Cette inscription trouve une résonance toute particulière dans la région de Sainte-Croix/L’Auberson, où sont réalisés encore aujourd’hui aussi bien des boîtes à musique et des automates que de l’horlogerie. Une exception dans ce vaste territoire international, selon les spécialistes.

 

 

 

 

 

 
 

Cette inscription sur la liste représentative de l’Unesco est importante pour les artisans de Sainte-Croix/L’Auberson. Ils ne sont plus si nombreux à détenir un précieux savoir-faire, qu’ils souhaitent transmettre. KEYSTONE

De Sainte-Croix à Oman

Le comité a loué l’excellence du dossier présenté, qualifié «d’exemplaire» pour sa mise en évidence de l’importance du patrimoine culturel immatériel dans un espace transfrontalier. Contrairement à d’autres – les candidatures étaient au nombre de 42 –, les savoir-faire de l’arc jurassien n’ont pas suscité la moindre question au sein de ce jury international qui s’est notamment penché sur l’inscription des groupes de musique traditionnelle de Roumanie, du tissage traditionnel Al Sadu en Arabie saoudite et au Koweït, de la course de dromadaires aux Émirats arabes unis et à Oman ou encore de la culture du sauna en Finlande.

L’affaire franco-suisse, portée par l’Office fédéral de la culture, n’a donc pas fait l’ombre d’un pli. Et sa résolution s’est révélée infiniment plus simple que les mécanismes complexes qui animent les boîtes à musique, automates et autres machines à rêves manufacturés à Sainte-Croix et à L’Auberson depuis deux siècles pour les premiers, plusieurs décennies pour les autres.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
Aujourd’hui, la mécanique d’art se transmet surtout par compagnonnage. OLIVIER ALLENSPACH
 

Au départ, la demande d’inscription concernait surtout l’artisanat horloger. Et c’est beaucoup grâce à Séverine Gueissaz, membre du conseil de fondation du Centre international de la mécanique d’art de Sainte-Croix (CIMA), que la fabrication d’automates et de boîtes à musique, caractéristique de la région du balcon du Jura vaudois, a pu y obtenir la place dont elle dispose aujourd’hui. «Au sein du comité chargé de monter ce dossier, elle a réalisé un travail considérable pour faire reconnaître ce domaine qui n’a pas la puissance de feu des grands groupes horlogers», affirme du reste le syndic de Sainte-Croix, Cédric Roten.

Et à l’origine, il n’était pas non plus binational. Dans le travail d’élaboration du dossier auquel ont participé un certain nombre d’artisans, il est rapidement apparu que ce double savoir-faire était commun à l’ensemble de l’arc jurassien, sans respect des frontières. «Contactée, la France a dû remplir une fiche d’inscription qu’elle n’avait pas préparée. Le sud de l’Allemagne, où ce type d’artisanat s’exerce aussi, n’a en revanche pas souhaité nous rejoindre», précise Séverine Gueissaz.

Cette inscription est importante pour les artisans actuels, qui ne sont plus si nombreux à détenir ce précieux savoir. Et ce n’est pas Nicolas Court, restaurateur et créateur d’automates et de boîtes à musique, qui dira le contraire, malgré la grande émotion que lui procure cette reconnaissance internationale. «C’est un magnifique coup de projecteur qui pourrait bien donner un avenir à la transmission de nos connaissances et apporte du respect à nos ancêtres.»

Cofondateur avec l’automatier François Junod et l’horloger concepteur et restaurateur Denis Flageollet de la Formation en mécanique d’art (FEMA), il souhaite que le label Unesco amène des jeunes à s’intéresser à ce domaine. «En alliant les technologies d’aujourd’hui à notre savoir-faire manuel et aux idées des nouveaux venus, les objets que nous réalisons désormais possèdent bien une part de modernité», souligne-t-il.

Susciter de nouvelles vocations

C’est du reste bien dans cette idée de susciter de nouvelles vocations que le CIMA et le Centre professionnel du Nord vaudois se sont associés à la candidature. Le premier représente la conservation des traditions, alors que le second dispense une formation de base en mécanique, prélude à un apprentissage plus spécifique en mécanique d’art.

Conservation et transmission sont aussi les termes qui reviennent dans les propos du syndic, qui n’oublie pas de préciser que des collaborations ont déjà été mises en place avec la Haute École d’ingénierie et de gestion (HEIG, dont un institut est installé à Sainte-Croix sur le site du Technopôle) et l’Écal. «Il y a largement de quoi repenser différemment certaines pièces. Mais j’espère aussi que cette reconnaissance boostera plusieurs projets qui ont été lancés parallèlement à cette candidature. Je pense notamment à la FEMA qu’on aimerait bien à terme formaliser, au musée unique bien sûr, mais aussi à la création d’un atelier de transmission du savoir-faire dans l’ancien bâtiment HPI.»

24 Heures, Frédéric Ravussin, 16.12.2020

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