Le cliquetis des trésors mécaniques du CIMA de Sainte-Croix se taira un an

Des bénévoles s’affairent au Centre international de la mécanique d’art pour démonter et emballer les collections, avant la rénovation et la fusion du musée.

Le temps presse car le Centre international de la mécanique d’art de Sainte-Croix doit être entièrement vide au 1er juin. Alors, même si elle est fermée depuis fin mars, l’ancienne fabrique de boîtes à musique – reconvertie en musée en 1985 – s’anime les samedis ou durant les vacances. Une quinzaine de bénévoles s’activent pour empaqueter méticuleusement les pièces de la collection du CIMA.

«On n’emballe pas directement avec du papier bulle car ça marque le bois, prévient Séverine Gueissaz, membre de la fondation. Il faut d’abord envelopper les objets dans du papier de soie.» Celle qui fait également partie du comité de pilotage du futur Musée unique précise que l’emploi de bénévoles permet de réduire les coûts. «Il y a même Arlette Baud, qui est octogénaire, et dont la collection a été rachetée en 2018

Héritage de l’âge d’or industriel

Noyés dans une pénombre fantomatique, les imposants automates de la «Forêt enchantée» se distinguent depuis la porte de la salle Guido Reuge, fermée depuis plusieurs années. Près des sculptures loufoques d’Étienne Delessert, autrefois animées, sommeillaient quelques pépites. «On a découvert de jolies pièces, comme un médaillon et une mini-montre, qui seront valorisées dans la future exposition», souligne Séverine Gueissaz.

Les vitrines sont déjà quasi toutes nues et les cartons s’amoncellent dans les salles d’exposition. Boîtes à musique, oiseaux chanteurs, automates, machines à écrire Hermès, tourne-disques Thorens ou projecteurs Bolex, cet héritage de l’âge d’or industriel de Sainte-Croix est prêt pour le déménagement (lire encadré). Restent encore la cave et de volumineux instruments, tels que les orchestrions, à démonter avant un vide-grenier le 21 et 22 mai.

À ce titre, l’atelier de mécanique ancienne, où tournaient encore les vieilles machines usinant les pièces des boîtes à musique, s’avère plus délicat à déplacer. «Surtout quand c’est fixé au plafond! C’est de la fonte, certaines machines font une tonne», lance Grégoire Wyss, affairé sur une roue de transmission. Chaque élément est inventorié et marqué avec du scotch jaune fluo. Une soixantaine de photos documentent l’installation, qui ne sera pas forcément remontée à l’identique.
 

Un an de travaux

Dans l’odeur de cambouis, Grégoire Wyss raconte son lien intime avec la conservation du patrimoine industriel, après la crise. «Mon père était médecin à Sainte-Croix et soignait les anciennes travailleuses à domicile. Elles lui ont transmis de nombreux outils. Il a récupéré des pièces durant trente ans», se souvient celui qui entretient l’Atelier de mécanique ancienne du docteur Wyss, qui se visite sur demande en ville.

L’atelier est d’ailleurs la propriété du Musée des arts et sciences, qu’il préside. C’est l’une des trois entités qui fusionneront en un Musée unique, avec le CIMA et le Musée Baud, et donc la raison des travaux de réaménagement et d’isolation du bâtiment. Pour parvenir à intégrer les milliers de pièces des deux nouvelles collections, elles seront exposées sous forme de Schaudepot, soit des murs de vitrines en visite libre.

Ce chantier à 9,8 millions de francs – principalement des dons privés – doit durer une année, pour une réouverture en été 2023. «Mais nous restons prudents. Avec la pénurie de matières premières, les coûts et les délais pourraient augmenter. Nous en saurons plus cet automne», glisse Séverine Gueissaz. Avant cela, il faudra aussi recruter une conservatrice ou un conservateur pour prendre la direction du futur Musée unique.

Déménagement dans un dépôt sécurisé

Une fois emballés, les précieuses boîtes à musique, automates et autres machines témoignant du passé industriel de la ville seront progressivement et discrètement stockés dans un local sécurisé de Sainte-Croix. Une alarme incendie et intrusion sera activée – tout comme au CIMA tant qu’il y reste des objets – pour protéger le millier d’objets qui patienteront sur des étagères. Les plus volumineux, comme les orchestrions, en pièces détachées. Les conditions climatiques de l’endroit seront également contrôlées.

«Il faut éviter de grosses variations de température et d’humidité, qui pourraient faire rouiller les nombreuses pièces métalliques ou craquer le bois, s’il fait trop sec», renseigne Séverine Gueissaz. Les vitres du local de 220 m2 ont aussi été obscurcies pour éviter le soleil direct sur le bois. Les collections sommeilleront là une année. Durant ce laps de temps, le public en quête du patrimoine mécanique du balcon du Jura pourra se rendre au Musée Baud, à L’Auberson. 

Fabien Lapierre, 13 mai 2022


La quasi-totalité des pièces du Centre international de la mécanique d’art de Sainte-Croix est emballée et prête au déménagement. Le mobilier restant partira lors d’un vide-grenier les samedi 21 et dimanche 22 mai.

Grégoire Wyss et Michel Previtali inventorient chaque machine, dont certaines en fonte pèsent une tonne. Elles servaient à confectionner les pièces des boîtes à musique qui ont fait la renommée de Sainte-Croix.

Grégoire Wyss, président du Musée des arts et sciences, devant un projecteur Bolex, fabriqué à Sainte-Croix lors de son âge d’or industriel.


Dans la salle Reuge, les sculptures d’Etienne Delessert n’ont pas vu le public depuis des années.

 

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